lundi 9 septembre 2013

Être vendeuse (méchancetés inside)

Si vous ne le savez pas encore, avant je travaillais pour une marque de luxe. Enfin comme vendeuse hein. Vendeuse payée au smic monégasque ou un poil plus et avec de bonnes primes d'été et de Noël mais pas de quoi se taper le cul par terre non plus. Enfin, avant, malgré mes 45h par semaine je gagnais bien ma vie. Mais ça c'était avant. Parce que j'en ai eu marre de cette ambiance, de ces chiffres inateignables pour avoir quoi? 180€ net de plus sur la fiche de paie? Alors que le sac même basique atteint déjà les 1500 boules. De qui se foutent-ils? Dans un état d'esprit pas très adulte j'ai fait ma belle et j'ai jeté l'éponge, au bout d'un an. Nique sa mère le luxe et les CDI. Je me casse. Je pars visiter le monde arabe. Ouais c'est ça. Bouffer des pommes de terre devant ma télé plutôt. Sans le chômage, comme le veut la démission d'un CDI. Enfin bref. Non mais je vous avoue que ce fut quand-même un putain de soulagement de quitter ce travail qui était devenu si pesant.

Sauf qu'au bout de deux mois et demi à me gratter la ch*tte jusqu'au sang avec le compte en banque qui se vide dangereusement (oui parce que continuer de payer un loyer et faire ses courses sans revenus, ça a un coût quand-même et même si ton mec gagne bien sa vie, t'inquiètes qu'il te laisse crever la bouche ouverte), j'ai du aller chercher du travail. Enfin chercher... Prendre le premier truc qui passe pour renflouer les caisses. Je vais pas vous mentir, j'ai pas vraiment galéré, mon patron actuel m'a embauchée comme ça, sans entretien, sans prise de tête. Je me suis présentée avec mon CV "luxe", le lendemain il me donnait rdv le 2 avril pour mon premier jour. On n'a même pas parlé salaire, grave erreur. Mais ça c'est une autre histoire.

Bref, maintenant ça fait six mois. Six mois que je travaille dans un magasin de frippes made in China. C'est de la merde mais c'est pas grave, je continue de penser que c'est "pour dépanner". Inch'Hallah. (Non mais je compte vraiment me mettre à chercher). 

Et comme le métier de vendeuse dans un magasin pas cher offre son lot de réjouissances quotidiennes, j'avais envie de vous les faire partager. 

Commençons par un petit résumé de la clientèle: 

-La cliente locale: Petite, vieille, moyenne d'âge 55 ans. Pas un rond. Ça joue les grandes dames mais ça n'y connait rien. Gare à toi si un matin tu n'es pas en forme parce que tu t'es disputée avec ton gars ou parce que tu as la courante depuis le veille: la cliente locale ira dire aux plus anciennes du magasin que tu es froide, pas sympathique voire prétentieuse. Bref, elle essaiera de te faire perdre ton travail parce qu'elle a la langue bien pendue et surtout rien à foutre de sa vie. Un conseil: Suce-la. Un petit peu même si c'est difficile. Parle de la météo de demain ou du vent de la nuit dernière. Ça fait chier mais c'est suffisant pour qu'il n'y ait pas de répercussions importantes sur ton sort (déjà malheureux). Tu l'insulteras de pute quand tu ne travailleras plus là.

•LES TOURISTES: 

-Le français (en vacances): Tu le reconnais à son bermuda et à sa paire de claquettes début avril. Il est moche, n'a pas de style et va essayer de te faire croire qu'il va acheter quelque chose mais que dalle. Il a ramené sa femme qui a les jambes blanches et son ado boutonneux à pantacourt rayé. Le français en vacances te prend pour l'office du tourisme, son plan dans une main et sa granita dans l'autre il va te poser tout un tas de questions plus ou moins débiles sur les alentours. Un conseil: Ben sois débile toi aussi. Fais la vendeuse complètement teubée qui n'habite pas ici. 

-L'italienne: Bien foutue et élégante tu penses pouvoir l'habiller easy. En plus elle fait la fille qui va acheter tout le magasin avec ses trente-cinq bagues aux doigts et son faux Vuitton trouvé à Vintimille. Tu te vois déjà exploser le chiffre et recevoir les félicitations du patron. Oublie. Les français ont trouvé de sérieux concurrents en Italie. La faute à la crise peut-être? On s'en branle. Tout au mieux elle repartira avec une pochette en PVC. 

-La scandinave: Elle se pointe dans le magasin avec toute sa famille d'albinos et va y rester 2h30, debout devant la glace, en plein dilemme entre le top blanc, le ivoire ou le écru. Tu te demandes d'où son mari puise cette patience et de quoi peuvent-ils bien polémiquer pendant si longtemps dans leur langue étrange. Tout ça pour claquer 15€ à la fin. Des aliens.

-La russe: Elle rentre sans dire bonjour et ressort sans dire au revoir. (Enfin, quelques fois si elle est bien éduquée tu as droit à un discret "bonddjour".) Si le T-shirt coûte moins de 300 boules elle sortira aussi vite qu'elle est rentrée mais si elle n'a pas de tunes attends-toi à ce qu'elle te retourne le magasin avec ses copines. La russe est celle qui te remplit la cabine de vêtements en boule ou remis à l'envers sur le cintre. Et même quand elle essaie de t'aider elle fait de la merde. Les jeunes finiront parfois en string, défilant au milieu du magasin, tandis que les vieilles te demanderont la composition de la robe à 20€ dans un anglais approximatif "Kotone? Kotone?!", toujours sans dire merci ni merde. Mais c'est plutôt merde je crois. Un conseil: Si tu parles russe elle va soudain se mettre à sourire et à t'adorer, si tu as de la chance elle te ramènera un magnet de Moscou mais gare à toi. Tu vas devenir sa Cristina Cordula personnelle (sans la rémunération) et regretter toute ta vie d'avoir voulu être sympa avec une casse-couilles compliquée comme ça.

-L'asiatique: C'est la petite moche qui crie "Discount?!" si par malheur elle remarque une strie en trop sous la semelle de la chaussure. Je crois que même s'ils parlaient français on ne se comprendrait pas avec ces gens là. Un conseil: Répond-lui non.

-L'arabe: On parle bien de celui des émirats qui est blindé hein, mettons-nous d'accord, pas de Rim-K du neuftrois reprez. Bref. L'arabe riche rentre dans le magasin avec sa femme ou sa fille ou sa maîtresse ou sa mère et décide de se faire son porte-parole. Enfin parole... C'est un bien grand mot. Plutôt porte-interjections, sifflements et claquements de doigts. J'abuse mais on n'est pas très loin de la réalité. L'arabe s'attend à ce que tu lui déroules le tapis rouge parce qu'il a des mocassins en autruche et sa femme un voile à 1000€ rose fuschia mais quand il voit qu'au fond t'en as rien à foutre et qu'ici on n'est pas chez Chanel, alors il n'hésite pas à t'interpeler comme un iench pour te montrer un truc en vitrine ou pour que tu daignes bien vouloir enfiler la chaussure au pied de sa belle (et te casser le cul à sortir 25 autres boites parce que la pointure, la couleur ou la forme ne va pas). Attention, si tu es occupée avec un autre client il ne se gênera pas pour s'interposer entre vous deux et vous couper la parole. Un conseil: Envoie-le chier. Quand y'a pas le patron.

Après cette petite mise en bouche riche en saveurs, enchaînons donc sur les comportements agaçants de la clientèle. 

-Les gosses: Et plus particulièrement ceux qui courent, touchent et crient sans raison. T'as envie de les mettre sous Ritaline tellement c'est pas possible de supporter ces mongoles. Et leur mère: "Matéooooooo! Viens ici! Allez, non, touche pas ça! C'est la mad'moizelle qui va te mettre dehors si t'y es pas gentil, qu'est-ce que tu croyyyes?!" C'est ça ouais, c'est à moi de faire son éducation... C'est hallucinant les fautes de français que font ces idiotes. Elles devraient pas avoir le droit de faire des enfants. Bonne chance à eux d'ailleurs.

-Les gens qui veulent remettre les articles à leur place, pensant bien faire mais qui te rendent la tâche encore plus difficile. La tunique à l'envers sur le cintre, la chaussure dans la mauvaise boîte, le cintre à pinces sur le débardeur... Au secours. Laissez tout dans la cabine, y'a pas de problème. 

-Les gens qui touchent un article un quart de seconde pour le voir de plus près et se débrouillent quand-même pour le reposer au mauvais endroit ou avec la tête du cintre dans l'autre sens. 

-Ceux qui arrivent à cinq minutes de la fermeture. Ils pensent certainement qu'on a un sac de couchage et un bidet dans l'arrière boutique, pas de famille, pas de repas à préparer et surtout pas mal aux jambes. Va savoir?  

-Les vieilles qui perdent la boule. Alors d'accord c'est pas de leur faute et ça fait de la peine mais au bout de la cinquième fois que tu viens me demander s'il n'y a pas une montre de côté à ton nom, j'ai envie de te répondre que tu fais baisser ma productivité d'au moins 100% et que je vais pas tarder à t'envoyer chez le bijoutier d'en face. 

-Les gens qui te font tout répéter. Et plusieurs fois. Tu as soudain l'impression de te taper un vieil accent québécois que tu ignorais jusque-là. 
"25€ madame.
- Combiennn?
- 25.
- Commennnt?" 
- Lis le prix sur l'étiquette connasse." 

-Les gens qui te demandent ton avis jusqu'à te harceler mais qui au final ne le suive pas. Ça m'est arrivé avec une bonne femme qui hésitait terriblement entre une paire de boucles d'oreilles plumes ou des créoles (10€ hein... Dilemme de Ouf). Elle voulait absolument que je me prononce, arguments à la clé. Je lui ai donc expliqué pourquoi les plumes lui allaient mieux, etc etc. Elle a finalement pris les créoles, en me disant "Vous préfériez les plumes?" (Non non je faisais semblant), ce à quoi j'ai répondu "Oui mais les goûts et les couleurs ne se discutent pas." Ben figurez-vous que non contente de m'avoir cassé les couilles avec ses boucles d'oreilles, elle est aussi partie dire à une collègue que je n'étais pas sympathique et qu'elle ne mettrait plus les pieds ici. Effectivement je ne l'ai plus jamais revue. Grand bien me fasse.

Passons à ces questions agaçantes souvent posées. Elles donnent des pulsions meurtrières.

-"Je peux jeter un coup d'œil?" Oui, même les deux madame... Ce qui est malgré tout assez drôle dans cette question de merde, c'est que la française qui te la pose (oui n'imagine pas qu'une russe t'adresse la parole dans un souci de politesse) est souvent plantée à l'entrée du magasin, le doigt pointé vers l'intérieur, l'œil grand ouvert et l'air interdit, comme si elle s'attendait vraiment à ce que tu lui annonces que non, ici on ne peut pas regarder, il y a obligation d'achat et plus vite que ça svp.

- "Ça signifie quoi taille unique?" Je sais pas, va demander aux chinois. Et t'façons t'es trop grosse pour rentrer dedans. 

- "C'est quoi la matière de ce top? Ah, viscose? Polyester? Non non, olala, non merci!" Pour 10€ tu t'attendais à quoi? Du cachemire? Si tu veux du coton vas mettre trois fois le prix, idiote. 

-"Le portant de vêtements qui est dehors, c'est à vous?" Non, au pharmacien en face. 

-"Vous prenez l'American Express?" Vas-y, crâne.

Voilà. Pour vous résumer de quoi sont faites mes journées de travail. L'éclate totale. Enfin, je vous rassure, il y a aussi des gens sympas, drôles... Euh non. Je déconne. Le client est roi et il le sait. Gare à vous si je rentre dans votre magasin un de ces quatre. Il se pourrait bien que je balance des piles de pantalons par-terre pour déverser ce flot de haine hahaha... Décidément, ce travail me rend un tantinet aigrie. Souhaitez-moi bonne chance et surtout d'épouser un milliardaire parce que je pourrais pas continuer comme ça très longtemps, si vous voulez mon avis.

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